Papyrus

Deux collections de papyrus : la collection Graux et la collection Weill

L’École possède deux collections de papyrus : la collection Graux et la collection Weill. Pour en faciliter la consultation et par souci de conservation, ces deux collections remarquables dont une part importante n’est pas encore publiée, sont en dépôt à long terme à l’Institut de papyrologie de la Sorbonne. Ces deux collections sont propriété de l’École.

Le « fonds Graux »

Fonds patrimonial de philologie grecque qui concerne plus largement les sources gréco-romaines et byzantines

Initié en 1907 par Charlemagne-Henry Graux en mémoire de son fils, Charles Graux, décédé prématurément, qui fut en poste à l’EPHE de 1874 à 1881, le fonds est composé de 724 monographies et de 199 papyrus. Le don d'ouvrages s'accompagnait d'un legs en obligations destiné à des achats d'ouvrages et de papyrus. Avec le revenu et la vente de ces obligations, des ouvrages ont été achetés ainsi que des papyrus grecs d'époque romaine et byzantine, en Égypte par Henry Henne avant 1931. 150 papyrus et 49 fragments dont la plupart ont été déposés à l'Institut de Papyrologie de la Sorbonne de Paris IV dès l’origine. Depuis 1988, huit papyrus étaient conservés dans le bureau du directeur du SCDBA à Sainte-Barbe pour un usage pédagogique. A l’automne 2019, ces huit papyrus ont été retransférés à l’Institut de papyrologie.

Le fonds de papyrus Graux

Ce fonds de papyrus doit son nom à Charles Graux (1852-1882), qui fut Maître de conférences à l’EPHE pour la philologie grecque et bibliothécaire de l’Université de Paris. Mort très jeune, son legs a permis des achats de papyrus effectués bien plus tard, entre 1921 et 1923, pour le compte de la IVe section de l’EPHE. Une Fondation Charles Graux avait été montée pour cela.
Les sommes engagées en francs de l’époque s’élevèrent d’abord à 9000 francs en 1922-1923, puis 2000 francs en 1924-1925. Pour l’anecdote, le reste de l’argent a par ailleurs servi à rémunérer des conférences. Ce fonds tire donc son nom de façon posthume de Charles Graux qui n’a jamais acheté ni vu personnellement cette collection papyrologique.

La constitution de la collection

Sur les arrérages du legs Graux à l’EPHE, Henri Henne a pu effectuer plusieurs séries d’achats au Fayoum et à Alexandrie. M. Châtelain, chargé de l’administration du legs, lui avait complètement abandonné le soin des acquisitions.
Une première série de sept papyrus a d’abord été achetée par Henne.
Henne est aussi à l’origine d’une autre série d’achats au Fayoum, plus tard. On désigne ce dernier lot, qui comprend 17 documents, comme « 3e série ».
Entre temps, George Foucart, Directeur de l’IFAO, avait pu également acheter plusieurs papyrus, constituant finalement le gros de la collection. Il semble avoir procédé en plusieurs vagues : le « lot Foucart I b » comprend 33 pièces ; le « lot Foucart I d » et le « lot Foucart II » en ont 53 chacun ; enfin, le dernier groupe dit « lot Foucart III » regroupe 22 documents.

Caractéristiques principales du « fonds Graux »

L’essentiel de ces fragments date de l’époque romaine, même si la période byzantine est aussi bien représentée. A de rares exceptions près, il ne s’agit que de textes documentaires.
Une autre majorité écrasante se dégage : celle des textes rédigés en grec. Pour la quinzaine de textes restant, on trouve du copte (dans les séries Id, II et III) et de l’arabe (souvent dans des textes bilingues grec-arabe).

Inventaire et conservation

Ces papyrus ont été déposés dès leur arrivée sur le sol français à l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne, qui était encore à cette date dirigé par Pierre Jouguet et situé dans un parloir du Collège Sainte-Barbe au 4, rue Valette, lieu actuel du Service commun de la documentation, des bibliothèques et des archives de l’École. Ils ne sont jamais passés par les locaux historiques de l’EPHE.
Ils ont été immédiatement intégrés à l’inventaire des papyrus de la Sorbonne. Mais il semblerait qu’Henri Henne avait déjà établi une liste. L’inventaire de Jouguet a donc fait en sorte que ses numéros concordent avec la liste de Henne. Ainsi, le P.Graux I 1 a par exemple le double inventaire Inv.Sorb. 313 (= liste Henne 313). Comme les numéros de la « liste Henne » ne se suivaient pas, cela a d’ailleurs créé des lacunes dans le livre d’inventaire de la Sorbonne, qui ont été progressivement bouchées (par les P.Enteuxeis, par exemple).

Voici les numéros d’inventaire des différents lots acquis en Égypte :

  • 1er achat de Henne : Inv.Sorb. 313 à 319 ;
  • lot Foucart Id  : Inv.Sorb. 894 à 946 ;
  • lot Foucart Ib  : Inv.Sorb. 947 à 979 ;
  • lot Foucart II  : Inv.Sorb. 980 à 1032bis ;
  • lot Foucart III : Inv.Sorb. 1033 à 1052 ;
  • 3e série : Inv.Sorb. 1993 à 2009.

Parmi ces papyrus du « fonds Graux » sont arrivés également des papyrus issus du même contexte, mais n’appartenant toutefois pas stricto sensu à l’EPHE. En effet, un petit lot est parvenu indirectement à Henne, par l’intermédiaire de M. Louis Saint-Paul Girard, Secrétaire-bibliothécaire de l’IFAO à cette époque. Ce lot, expédié là encore par M. Foucart depuis le Caire, avait bien été financé par le legs Graux, mais par une partie attribuée directement à l’Université de Paris (et non à l’EPHE, via la Fondation Graux, comme expliqué précédemment). Voici ce que l’on peut lire encore de la main de Jouguet dans son inventaire : « Papyrus expédiés par M. Foucart, directeur de l’Institut français d’archéologie orientale, au Caire et payés avec mille francs, pris sur un crédit donné par la Société des Amis de l’Université de Paris. »
Ces papyrus sont au nombre de douze et couvrent les Inv. Sorb. 882 à 893. Ils constituent la « 2e série », dite « lot Louis Saint-Paul Girard ».
À l’heure actuelle, l’intégralité des papyrus achetés grâce à l’argent issu du legs de Charles Graux – EPHE comme Sorbonne – est toujours conservée à l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne. Seuls les inventaires 2007 à 2009 (les seuls provenant d’Alexandrie et non du Fayoum) ont été restitués, depuis l’été 1988, à l’École.

Publication

Pour l’instant, seule une trentaine des papyrus du « fonds Graux » est publiée (dont trois des papyrus de la Sorbonne).
Dès 1923, Henri Henne a publié deux premiers papyrus, dans le Bulletin de l’IFAO n° 21. Il a poursuivi quatre ans plus tard dans le n° 27 avec six papyrus.
Par la suite, il fallut attendre 1995 pour que de nouveaux papyrus du fonds Graux soient publiés, par Hélène Cuvigny. Ce corpus de 21 textes pris le nom de P.Graux II (n° 9 à 29), selon l’usage papyrologique. Rétrospectivement, le travail de Henne devenait le P.Graux I (n° 1 à 8).
Entre 1997 et 2004, Sophie Kambitsis publia le rouleau de papyrus correspondant aux numéros d’inventaire 2007-2008. Comme chaque face présentait un texte distinct, un même papyrus donna deux volumes de corpus : les P.Graux III (n° 30) et IV (n° 31).

Valorisation

Une étude est menée actuellement pour proposer aux instances ad hoc un projet finançable de numérisation (partenaire ComUE PSL, BSN5, projets européens…).

Bibliographie

  • HENNE, Henri, BIFAO XXI, 1923, p. 189 sqq. et BIFAO XXVII, 1927, p. 1 sqq. (= P.Graux I).
  • Annuaire de l’EPHE, Section Sciences historiques et philologiques, 1924-1925, p. 83.
  • Annuaire de l’EPHE, Section Sciences historiques et philologiques, 1925-1926, p. 106.
  • Annuaire de l’EPHE, Section Sciences historiques et philologiques, 1931-1932, p. 3-19.
  • CUVIGNY, Hélène, P.Graux II, Genève : Droz, 1995.
  • KAMBITSIS, Sophie, P.Graux III, Genève : Droz, 1997.
  • KAMBITSIS, Sophie, P.Graux IV, Genève : Droz, 2004.
  • Archives et livre d’inventaire de l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne.

 

Le « fonds Weill »

La constitution de la collection

L’ensemble de ce fonds a été constitué en trois temps. Le premier lot a été acquis au Caire en 1909-1910, le second au Fayoum en 1911-1912 et le dernier à Mellaoui en 1912. Au total, Raymond Weill a ramené entre 400 et 450 papyrus, même si cela est difficile à évaluer précisément : inventaire laborieux, plusieurs fragments par pochette, nombreux raccords entre différentes pochettes, etc. Même s’il en a lui-même beaucoup conduites pendant sa carrière, aucun de ses papyrus ne provient de ses fouilles (lieux et dates ne correspondent jamais).

Caractéristiques principales du « fonds Weill »

La collection assemblée par R. Weill comporte en majorité des papyrus grecs, mais aussi une part très importante de copte et une dernière non négligeable en arabe. Le premier lot (1909-1910) semblerait provenir en entier de la région d’Antinoé. Dans le détail, on trouve du grec dans les trois séries, la Série II étant d’ailleurs uniquement grecque. On trouve du copte dans les Séries I et III. Les textes arabes n’apparaissent qu’à la fin de la dernière série.
L’essentiel des textes est documentaire. La papyrologie littéraire est très peu représentée, mais souvent très originale et intrigante, comme un texte de symbolomancie par exemple. Parmi les textes coptes, nombreux sont ceux appartenant aux archives d’apa Sabinos. Quant à la partie arabe, elle offre un rare exemple de papyrus pehlevi.
Enfin, notons que quelques documents ne sont en réalité pas des papyrus, mais des fragments de parchemin ou de papier. Il y a également quelques cartonnages, difficiles à rattacher à l’un des trois lots.

Inventaire et conservation

Ces papyrus ont été déposés à l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne en 1922. Dès 1920, Pierre Jouguet, directeur de l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne, notait dans les « Chroniques » de l’Annuaire de l’EPHE : « M. Raymond Weill, dont la santé est toujours altérée, a l’intention de donner à l'École sa collection de papyrus grecs et coptes. »
Progressivement, ils ont été partiellement intégrés à l’inventaire des papyrus de la Sorbonne, ce qui complique leur désignation. Autrement dit, tous les papyrus Weill n’ont pas forcément un numéro Inv.Sorb. Le choix d’inventaire semble avoir été quelque peu anarchique, puisque par exemple tous les papyrus Weill publiés n’ont pas forcément un numéro Inv.Sorb., alors que quelques inédits en ont un. De façon générale, les documents coptes sont les mieux inventoriés, grâce au travail de Michel Pezin à l’Institut en 1987.
Avant même la question d’un inventaire Sorbonne se pose la question de plusieurs essais d’inventaire du fonds Weill en tant que tel, soit en dehors de sa présence au sein de la collection de la Sorbonne. Par exemple, la Série I dans son ensemble avait déjà été inventoriée (du moins, numérotée), selon la notation suivante : « W. n° ». Puis l’idée s’est faite de la reprendre en séparant les deux langues en présence (grec et copte). Cela a abouti à une numérotation « P. Weill grec n° ». Les textes coptes furent laissés à part, en restant « W n° ». Dans une même logique, il fut visiblement décidé de faire de même pour les deux séries suivantes, ce qui créa « P. Weill Série II grec n° » et « P. Weill Série III grec n° ». Au début, chaque série recommençait à zéro, avant de finalement se décider pour une numérotation continue. De ce fait, on passe de l’inventaire « Série II grec n° 337 » à l’inventaire « Série III grec n° 338 ». Pour la série III, les textes non grecs avaient été séparés dès le début. Nous avons donc à côté : « P.Weill Série III copte n° 1, etc » et « P.Weill Série III arabe n° 1, etc ».
À l’heure actuelle, l’intégralité des papyrus ayant appartenu à Raymond Weill est toujours conservée à l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne. Seules quelques rares pièces sont malheureusement aujourd’hui perdues. Pour certaines, une étude reste néanmoins possible, grâce aux fac-simile retrouvés de façon posthume dans les archives (notamment de cours) de Rémondon, par Jean Gascou en 1970.

Publication

Pour l’instant, seuls quelques papyrus du « fonds Weill » ont été publiés. Il s’agit à chaque fois de publications séparées, par lots d'un ou de plusieurs documents. Il n’y a donc pas encore eu de corpus publié à proprement parlé.

Bibliographie

  • Archives (dont les données issues du récolement du fonds par Florent Jacques durant l’hiver 2013) et livre d’inventaire de l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne.
  • Introductions des articles où sont déjà publiés quelques papyrus Weill.
  • REMONDON, Roger, Étude de papyrus et de textes de la collection Raymond Weill, Mémoire de DES, Université de Paris, 1947.
  • MILLIEZ, Carole, Les papyrus Weill : étude et inventaire d’un fonds complexe encore inexploré, Mémoire de Master 2, Université Paris IV, 2010.

 

Article rédigé par Florent Jacques, papyrothécaire à l’Institut de Papyrologie de la Sorbonne.