Avis de soutenance - doctorat - Charlotte MENTION

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Ecole doctorale 472
CEREGE – Arbois
Technopôle de l'Arbois-Méditerranée
BP80, CEDEX 04
13545 Aix-en-Provence
France
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Soutenue par Charlotte MENTION

Impact de l'Humidité relative atmosphérique (HR) sur les transitions entre forêts et savanes tropicales en Afrique centrale : approche combinant la paléoécologie et la géochimie isotopique

Forêts et savanes tropicales représentent les deux principaux écosystèmes tropicaux, couvrant 30% de la surface terrestre. Ils jouent un rôle majeur dans la régulation du climat via les cycles du carbone et de l'eau, et un cinquième de la population mondiale dépend de leurs services écosystémiques. Forêts et savanes subissent cependant de fortes pressions liées aux activités humaines et aux changements climatiques. Leur opposition fonctionnelle et structurelle entraîne des réponses contrastées à ces forçages, d'autant que des inconnues majeures restent à éclaircir sur leur fonctionnement. Des études antérieures du couvert arboré ont montré que ces écosystèmes peuvent constituer des états stables alternatifs (ESA) persistant sous une même zone bioclimatique. Dans cette zone de bistabilité, chaque état est entretenu par des boucles de rétroaction végétation-feu, mais si ces boucles sont perturbées par des changements des conditions environnementales ou le franchissement de seuils climatiques, elles peuvent provoquer des transitions abruptes. Néanmoins, les variables impliquées dans ces transitions restent mal identifiées, ce qui complique la prédiction de leur évolution face au changement global actuel. Si précipitations et régimes de feu sont des facteurs majeurs, d'autres variables comme l'humidité relative (HR), directement liées à la physiologie végétale, sont déterminantes mais demeurent peu étudiées. De plus, les activités humaines actuelles ajoutent de la complexité à l'analyse, leurs impacts dépassant les seuls forçages naturels. L'étude des paléoenvironnements en Afrique centrale à l'Holocène récent constitue alors un cadre idéal pour étudier ces transitions. D'importants changements de végétation ont été reconstruits, concomitants à des changements climatiques et des modifications de l'usage des terres par les populations humaines. Dans ce contexte, et dans la perspective de discriminer les déterminants d'une transition forêt-savane (F->S), les assemblages de phytolithe sont utilisés comme indicateurs de paléovégétation et leur triple composition isotopique en oxygène (17O-excess) comme nouvel indicateur climatique pour reconstruire l'HR. Avant son application sur des échantillons fossiles, un travail méthodologique a été mené pour développer un protocole permettant de concentrer les phytolithes d'autres particules de silice biogénique présentes dans les sédiments (e.g. frustules de diatomées, spicules d'éponges). Cette étape était nécessaire pour limiter le biais que ces particules introduisent dans la mesure du 17O-excess, puisqu'elles signent une triple composition isotopique en oxygène différente de celles des phytolithes, liée à l'environnement dans lequel elles se sont formées. Ce nouveau protocole a ensuite été utilisé pour calibrer le 17O-excess des phytolithes à partir d'échantillons modernes provenant de différents types d'archives (sols, sédiments lacustres, tourbeux). Les valeurs obtenues ont été comparées aux données modernes d'HR issues de la réanalyse ERA5, afin d'évaluer les biais liés au type d'archive, de confirmer la robustesse de la relation entre 17O-excess et HR et d'en évaluer la précision pour les reconstitutions paléoclimatiques. Enfin, l'application du 17O-excess des phytolithes pour reconstruire les changements d'HR, couplée à l'analyse des assemblages des mêmes phytolithes pour reconstituer la végétation durant l'Holocène récent (~2000 BP), a été effectuée sur les sédiments du lac Ngofouo (République du Congo). Les résultats, confrontés à d'autres indicateurs paléoenvironnementaux et archéologiques, montrent qu'il n'y a pas de changement significatif d'HR au moment du de la transition. En revanche, un changement du régime de feux est observé. La transition de la végétation vers la mosaïque actuelle, s'étend sur près de 400 ans. Ces résultats apportent des éléments clés sur les mécanismes et la temporalité de cette transition F->S, et sont discutés dans le cadre de la théorie des ESA.

Impact of Relative Atmospheric Humidity (RH) on tropical forest and savanna transitions in Central Africa: an approach combining palaeoecology and isotope geochemistry

Tropical forests and savannas are the two main tropical ecosystems, covering 30% of the Earth's land surface. They play a major role in regulating the climate through carbon and water cycles, and one-fifth of the world's population depends on the ecosystem services they provide. However, both forests and savannas are under strong pressure from human activities and climate change. Their structural and functional contrasts lead to divergent responses to these drivers, while major unknowns remain regarding their functioning. Previous studies of tree cover have shown that these ecosystems can exist as alternative ecosystem states (AES) within the same bioclimatic zone. In this bistable zone, each state is maintained by vegetation–fire feedbacks, but if these loops are disrupted by environmental changes or the crossing of climatic thresholds, abrupt transitions may occur. Yet, the variables involved in such transitions remain poorly identified, complicating predictions of their trajectories under current global change. While precipitation and fire regimes are recognized as major drivers, other variables such as relative humidity (RH), directly linked to plant physiology, are critical but remain understudied. Furthermore, contemporary human activities add complexity, as their impacts extend beyond natural forcings. The study of late Holocene paleoenvironmental changes in Central Africa provides an ideal framework to investigate these transitions. Significant vegetation shifts have been reconstructed, occurring alongside climatic changes and land-use modifications by human populations. In this context, and with the aim of disentangling the determinants of a forest-to-savanna (F->S) transition, phytolith assemblages were used as indicators of past vegetation, while their triple oxygen isotope composition (17O-excess) was applied as a new paleoclimate proxy for reconstructing RH. Prior to its application to fossil samples, a methodological effort was undertaken to develop a protocol for isolating phytoliths from other biogenic silica particles present in sediments (e.g., diatom frustules, sponge spicules). This step was necessary to minimize bias in 17O-excess measurements, since these particles record a triple oxygen isotope composition distincts from phytoliths, reflecting the environments in which they formed. This new protocol was then used to calibrate 17O-excess of phytolith values against modern RH using samples from different types of archives (soils, lacustrine sediments, peat sediment). The obtained values were compared to ERA5 reanalysis RH data to assess archive-specific biases, confirm the robustness of the relationship between 17O-excess and RH, and evaluate its accuracy for paleoclimate reconstructions. Finally, 17O-excess of phytolith was applied to reconstruct RH changes during the late Holocene (~2000 BP) using sediments from Lake Ngofouo (Republic of Congo), in parallel with phytolith assemblages to reconstruct past vegetation. Results, confronted with independent paleoenvironmental and archaeological proxies, reveal no significant change in RH at the time of the transition. Instead, a shift in fire regimes was observed. The vegetation transition towards the present-day mosaic extended over nearly 400 years. These findings provide new insights into the mechanisms and timing of the F->S transition and are discussed in the framework of the AES theory.
Directeur de thèse :
Christelle HÉLY
Unité de recherche :
ISEM - Institut des Sciences de l'Evolution -Montpellier
Membres du jury :
  • Directeur de thèse : Christelle HÉLY
  • Rapporteur : Valérie DAUX , Professeur (Université Versailles -Saint Quentin en Yveline)
  • Rapporteur : Anne-Laure DANIAUX , Chargé de recherche (Université Bordeaux)
  • Examinateur : Laurent BREMOND , Directeur d'études (Université de Montpellier)
  • Examinateur : Erwan MESSAGER , Chargé de recherche (Université Savoie Mont Blanc)
  • Co-encadrant de thèse : Julie ALEMAN , Chargé de recherche (Université Aix-Marseille)
Diplôme :
Doctorat Systèmes intégrés, environnement et biodiversité
Spécialité de soutenance :
Biodiversité et écosystèmes fossiles et actuels