Avis de soutenance - doctorat - Thomas GUTTIEREZ

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Ecole doctorale 472
Universite de Perpignan, 52 Av. Paul Alduy, Bâtiment U
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Soutenue par Thomas GUTTIEREZ

Écologie et génétique des populations d'Atrina vexillum en Polynésie française : support pour la conservation de l'espèce

Cette thèse porte sur Atrina vexillum (Born, 1778), un grand bivalve marin sessile appartenant à la famille des Pinnidae, encore peu étudié en Polynésie française. L'espèce est potentiellement importante sur le plan écologique, en tant que constructeur d'habitat, mais sa répartition, son écologie et sa biologie restent largement méconnues dans cette région. Dans ce contexte, un échantillonnage d'envergure a été réalisé sur six îles de l'archipel de la Société (Tahiti, Moorea, Huahine, Raiatea, Taha'a et Bora-Bora), pour un total de 2 650 individus collectés. La thèse s'articule autour de deux volets complémentaires : un volet écologique, visant à décrire l'habitat et la distribution de l'espèce, et un volet génétique, centré sur la diversité, la structuration et la parenté des populations. Le volet écologique a permis de combler un manque de données de base sur l'espèce. Des plongées systématiques ont permis de caractériser les habitats occupés (type de substrat, profondeur, environnement lagonaire ou de passe), les tailles des individus et les densités locales. L'analyse révèle une forte hétérogénéité spatiale, tant en termes de répartition que d'abondance. Certaines îles abritent des populations denses et localisées, tandis que d'autres présentent des individus très dispersés. La distribution semble influencée par la nature du substrat (préférence pour les zones meubles), la profondeur, et des facteurs environnementaux locaux. Ces résultats suggèrent une fragmentation importante des habitats favorables à A. vexillum, posant la question de la connectivité entre sites. Le volet génétique s'appuie sur le développement de 30 marqueurs microsatellites spécifiques à Atrina vexillum. Ces marqueurs ont été appliqués à deux échelles d'analyse. À l'échelle régionale, une analyse de structure génétique a été menée sur un large échantillon couvrant les six îles. Les résultats mettent en évidence une différenciation génétique significative entre les îles, malgré leur relative proximité géographique (quelques dizaines de kilomètres). Cette structuration suggère une connectivité restreinte, probablement limitée par les barrières naturelles que constituent les lagons, les passes récifales, les courants côtiers, mais aussi par les traits de cycle de vie de l'espèce, notamment un développement larvaire vraisemblablement restreint à l'échelle intra-lagonaire. À une échelle plus fine, une seconde série d'analyses a été menée spécifiquement à Bora-Bora, sur 1 205 individus génotypés. En utilisant des méthodes de reconstruction de parenté, il a été possible d'identifier de nombreux groupes familiaux, certains comprenant jusqu'à 19 individus apparentés (pleins ou demi-frères/sœurs). Ces résultats traduisent des épisodes de recrutement familial localisé, et confirment une dispersion larvaire probablement limitée dans le temps et dans l'espace. La cooccurrence fréquente d'individus apparentés sur un même site souligne l'importance des dynamiques de cohorte et de la reproduction localisée, avec des implications directes sur le renouvellement des populations. L'ensemble des résultats met en lumière une diversité génétique globalement élevée, une structuration inter-îles forte, et une structuration intra-île influencée par les relations de parenté. Ces observations remettent en question l'idée d'une dispersion larvaire pélagique large, souvent supposée chez les bivalves tropicaux, et soulignent au contraire la nécessité d'adopter une approche populationnelle à fine échelle pour la conservation. Ce travail propose ainsi des bases concrètes pour le suivi et la gestion locale de l'espèce dans les lagons polynésiens, en intégrant les spécificités écologiques, démographiques et génétiques propres à ces environnements insulaires. Il contribue plus largement à la compréhension des mécanismes de structuration des populations marines tropicales et de leur vulnérabilité face aux changements environnementaux et aux pressions anthropiques.

Ecology and Population Genetics of Atrina vexillum in French Polynesia: A Basis for Species Conservation

This thesis focuses on Atrina vexillum (Born, 1778), a large sessile marine bivalve from the family Pinnidae, which remains poorly documented in French Polynesia. The species may play an important ecological role as a habitat-forming organism, yet its distribution, ecology, and biology are still largely unknown in this region. To address these gaps, an extensive sampling effort was carried out across six islands of the Society Archipelago (Tahiti, Moorea, Huahine, Raiatea, Taha'a, and Bora-Bora), totaling 2,650 individuals. The thesis is structured around two complementary components: an ecological component, aimed at describing habitat and distribution patterns, and a genetic component, focused on the diversity, structure, and kinship of populations. The ecological study aimed to fill the baseline knowledge gap on this species. Systematic dives allowed for the characterization of occupied habitats (substrate type, depth, lagoon or pass environments), individual size distributions, and local densities. The results revealed strong spatial heterogeneity, both in distribution and abundance. While some islands host dense and localized populations, others show widely scattered individuals. Distribution patterns appear to be influenced by substrate type (preference for soft or mixed substrates), depth, and local environmental factors. These findings suggest significant fragmentation of suitable habitats, raising concerns about population connectivity. The genetic component is based on the development of 30 species-specific microsatellite markers. These markers were used for two levels of analysis. At the regional scale, a population structure analysis was conducted across the six islands. Results revealed significant genetic differentiation between islands, despite their close geographic proximity (tens of kilometers). This structuring suggests restricted connectivity, likely constrained by natural barriers such as lagoons, reef passes, coastal currents, and also by the species' life-history traits, including a likely intra-lagoon larval development. At a finer scale, a second series of analyses was conducted specifically on Bora-Bora, involving 1,205 genotyped individuals. Using pedigree reconstruction methods, we identified numerous family groups, with some including up to 19 related individuals (full or half siblings). These results reflect events of localized family recruitment, consistent with limited larval dispersal in both time and space. The frequent co-occurrence of related individuals within sites highlights the role of cohort dynamics and localized reproduction in shaping local populations. Overall, the results reveal a generally high genetic diversity, strong inter-island structure, and within-island structure influenced by kinship patterns. These findings challenge the common assumption of broad pelagic larval dispersal in tropical bivalves and instead emphasize the need for fine-scale population approaches in conservation planning. This work provides concrete guidance for the local management and monitoring of Atrina vexillum in Polynesian lagoons, taking into account the ecological, demographic, and genetic specificities of insular marine environments. More broadly, it contributes to our understanding of population structuring mechanisms in tropical marine species and their vulnerability to environmental changes and anthropogenic pressures.
Directeur de thèse :
Serge PLANES
Unité de recherche :
Centre de recherches insulaires et observatoire de l'environnement
Membres du jury :
  • Directeur de thèse : Serge PLANES , Directeur de recherche (EPHE PARIS)
  • Co-encadrant de thèse : Emilie BOISSIN , Ingénieur de recherche (CRIOBE)
  • Examinateur : Sarah LEMER , Professor (Museum of Nature Hamburg)
  • Examinateur : Ivan PAZ-VINAS , Associate professor (Université de Lyon 1)
  • Rapporteur : Vianney DENIS , Professor (Institute of Oceanography, National Taiwan University)
  • Rapporteur : Céline REISSER , Cadre scientifique des EPIC (IFREMER)
Diplôme :
Doctorat Systèmes intégrés, environnement et biodiversité
Spécialité de soutenance :
Sciences de l'environnement marin