Avis de soutenance - doctorat - Sebastiano CRESTANI
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Ecole doctorale 472
Dipartimento di Beni Culturali, Via degli Ariani 1, 48121, Ravenna
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Sebastiano CRESTANI
La littérature juive entre XI et XIII siècle: les attentes messianiques et de rédemption à la lumière des persécutions pendant les Croisades.
Dès le début du deuxième millénaire, les relations entre juifs et chrétiens se sont considérablement détériorées. La reprise économique et la nouvelle attitude de l'Église à l'égard du pouvoir et de la société sapent progressivement les fondements de l'équilibre établi au cours des siècles précédents entre l'idée augustinienne du testimonium fidei et la nécessité de distinguer les adeptes des deux religions. C'est dans ce contexte de dégradation progressive des relations entre juifs et chrétiens que s'inscrivent les persécutions des croisades, et en particulier les attaques contre les communautés rhénanes en 1096. Et c'est dans cette même perspective qu'il faut comprendre la production, la copie et la diffusion de textes eschatologiques juifs, remplis d'invectives antichrétiennes et de prières pour que Dieu libère le peuple juif de la sujétion à l'ennemi par excellence, Edom, c'est-à-dire le monde chrétien. Ce type de littérature répondait aux attaques de plus en plus fréquentes et systématiques des chrétiens, non seulement contre les communautés juives au sens physique du terme, mais aussi contre le système de croyances juives et le rôle qu'elles occupaient dans la société de l'époque.
Les textes que j'ai étudiés doivent être compris comme des outils herméneutiques de résistance contre un pouvoir perçu comme oppressif, mais aussi de consolation, afin de replacer les souffrances qu'Israël a dû subir à l'époque des croisades dans un schéma plus large visant à la rédemption finale. Il est donc rare que les textes apocalyptiques-eschatologiques prônent la lutte armée contre le pouvoir en place. C'est dans cette attitude qu'il faut voir l'hostilité du monde rabbinique à l'égard des mouvements pseudo-messianiques, à l'origine, surtout à l'époque des grandes guerres contre Rome au IIe siècle, d'immenses catastrophes pour le peuple juif. En effet, le monde rabbinique tendait à préférer un messianisme de type passif, centré sur l'attente confiante de l'intervention de Dieu dans l'Histoire pour amener son peuple à la rédemption. Une telle attitude se retrouve donc dans certains des textes que j'ai examinés et, en particulier, dans ceux qui ont probablement circulé au Proche-Orient entre le XIe et le XIIe siècle. Il s'agit d'une période d'agitation messianique, provoquée aussi par les événements liés aux croisades et à la volonté, du côté juif, de reprendre possession de Jérusalem. De telles initiatives sont donc découragées dans certaines apocalypses, où c'est le Seigneur seul qui agit pour sauver son peuple, ou en tout cas pour le guider vers la victoire finale.
L'élan messianique qui, entre autres motivations, a conduit un certain nombre de rabbins à s'installer en terre d'Israël au début du XIIIe siècle, a quelque peu changé le paradigme. Les textes produits dans le contexte de cette ʽaliyah offrent une image plus active du peuple d'Israël, prônant, avec l'aide de Dieu, sa propre libération du jeu étranger. Cependant, lorsque certains des textes probablement produits à Acre au cours du XIIIe siècle sont parvenus en Europe, un nouveau remaniement a eu lieu, et des éléments plus caractéristiques d'un messianisme actif et participatif ont été mélangés à d'autres qui renvoyaient à une attitude plus résignée et passive. En Europe, la domination chrétienne ne faiblit pas et les esprits juifs doivent se taire afin d'éviter l'émergence de mouvements messianiques aux conséquences néfastes. C'est dans cette perspective qu'il faut lire certains textes, résultat d'un assemblage de différentes homélies, porteuses de différentes idéologies. Ainsi, nous avons des sections où l'on peut entrevoir une attitude active à l'égard de la poussée messianique, tandis que dans d'autres, la conviction prévaut que la meilleure façon d'atteindre la rédemption finale est d'attendre avec confiance l'intervention divine.
Jewish literature between 11th and 13th centuries: Messianic and redemptive expectations in light of the persecutions in the era of the Crusades.
From the beginning of the second millennium, there was a significant deterioration in relations between Jews and Christians. The economic recovery and the Church's new attitude towards power and society gradually undermined the foundations of the balance that had been established in previous centuries between the Augustinian idea of the testimonium fidei and the need to distinguish between adherents of the two religions. The persecutions during the crusades, and in particular the attacks on the Rhenish communities in 1096, must be inscribed in this context of the progressive deterioration of relations between Jews and Christians. And it is in this same perspective that we should understand the production, copying and circulation of Jewish eschatological texts, full of anti-Christian invectives and prayers for God to free the Jewish people from subjection to the enemy par excellence, Edom, i.e. the Christian world. This type of literature responded to the increasingly frequent and systematic attacks by Christians, not only on Jewish communities in the physical sense, but also on the Jewish belief system and the role they occupied in the society of the time.
The texts I studied are to be understood as hermeneutical tools of resistance against a power perceived as oppressive, but also of consolation, in order to place the sufferings Israel was forced to undergo in the period of the crusades within a broader scheme aimed at final redemption. Rarely, therefore, do apocalyptic-eschatological texts extol armed struggle against the ruling power. In this attitude one can glimpse the rabbinic world's hostility towards pseudo-Messianic movements, the cause, especially during the period of the great wars against Rome in the 2nd century, of immense catastrophes for the Jewish people. In fact, the rabbinic world tended to prefer a messianism of a passive type, centred on the confident expectation of God's intervention in History to bring His people to redemption. This kind of attitude is therefore found in some of the texts I have considered, and, in particular, in those that probably circulated in the Near East between the 11th and 12th centuries. This was a period of messianic unrest, provoked also by the events linked to the crusades and the desire, on the Jewish side, to regain possession of Jerusalem. Such initiatives are therefore discouraged in some apocalypses, in which it is the Lord alone who acts to save his people, or in any case to guide them to final victory.
The messianic drive that, among other motivations, led several rabbis to settle in the land of Israel at the beginning of the 13th century, changed the paradigm. The texts that were produced in the context of this ʽaliyah offered a more active image of the people of Israel, advocating, with God's help, their own liberation from foreign play. However, when some of the texts probably produced in Acre during the 13th century reached Europe, a new reworking took place, and elements more characteristic of an active and participatory messianism were mixed with others that referred to a more resigned and passive attitude. In Europe, Christian domination was showing no signs of relenting, and Jewish spirits had to be kept quiet in order to avoid the emergence of messianic movements with nefarious consequences. It is in this perspective that some texts, the result of an assemblage of different homilies, carrying different ideologies, should be read. Thus, we have sections in which one can glimpse an active attitude towards the messianic thrust, while in others the conviction prevails that the best way to reach the final redemption is to confidently await
Directeur de thèse :
Judith SCHLANGER
Cotutelle :
Université Alma Mater Studiorum de Bologne (ITALIE)
Unité de recherche :
Savoirs et pratiques du Moyen Âge à l'époque contemporaine
Membres du jury :
- Directeur de thèse : Judith SCHLANGER
- Président : Saverio CAMPANINI , Professeur (Università di Bologna, Dipartimento di Storia Culture Civiltà)
- Examinateur : Emma ABATE , Chargé de recherche (Università di Bologna, Dipartimento di Beni Culturali)
- Examinateur : Daniel STOEKL BEN EZRA
- Examinateur : Corrado MARTONE , Professeur (Università di Torino, Dipartimento di Studi Umanistici)
- Examinateur : Pierluigi PIOVANELLI
- Rapporteur : Arcari LUCA , Associate professor (Università degli Studi di Napoli)
- Rapporteur : Marco Giuseppe RAININI , Associate professor (Università Cattolica)
Diplôme :
Doctorat Histoire, textes, documents
Spécialité de soutenance :
Langues, littératures et civilisation juives